les sanctions administratives communales de plus en plus contestées...



Après la ligue des Droits de l'homme et les organisations de jeunesse en novembre dernier,
ce sont aujourd'hui les syndicats CSC et FGTB qui introduisent un recours pour faire annuler la nouvelle loi sur les sanctions administratives communales, entrée en vigueur ce 1er janvier 2014.






Cette loi votée par la majorité au parlement fédéral, serait, selon la Ministre de l'Intérieur, Joëlle Milquet, un instrument magique pour lutter contre toutes les formes d'incivilités et les petits actes de délinquance qui se déroulent dans nos cités.
Mais ce beau projet est de plus en plus contesté et la Ministre de l'Intérieur, face au malaise ambiant, a écrit aux bourgmestres en fin décembre afin de rappeler le cadre dans lequel les sanctions sont applicables.

A Tournai, le conseil communal a déjà intégré ce nouveau dispositif dans son règlement de police sans attendre la date d'entrée en vigueur de la loi.





Au conseil communal du 9 décembre 2013, j'avais relayé les craintes du groupe ECOLO face à la justice de "shérifs" que représente l'application de cette loi :



"Ce soir, nous sommes amenés à adapter notre règlement de police en fonction de la nouvelle loi sur les sanctions administratives du 24 juin 2013. (...)



Pour ECOLO, le débat de ce soir n'a pas été suffisamment préparé par une information et un débat préalables en commission. Ce fut un travail de bénédictin de mettre en lien les propositions de sanctions prévues dans le dossier et les articles concernés dans le règlement général de police. Même après deux heures de travail, je ne suis pas parvenue à déterminer les nouvelles incivilités punissables aujourd'hui, après l'adaptation de notre règlement de police. Or, nul n'est censé ignorer la loi. Le débat communal ne sera profitable qu'après une évaluation de l'application de la loi de 2004 sur le terrain et une analyse approfondie des possibilités et des limites de la nouvelle loi de juin 2013 face aux réalités tournaisiennes.





Le nouvel article 252 du règlement général est un véritable « fourre-tout »d'actes répréhensibles par des sanctions administratives que nos concitoyens sont censés connaître. Quelques exemples : les Tournaisiens sont-ils au courant qu'ils sont passibles d'une amende de 350 euros max s'ils nourrissent des animaux en rue ? Les propriétaires de chien savent-ils que la laisse de leur animal favori ne peut dépasser un mètre cinquante sous peine d'une amende administrative? Les jeunes sortant d'une fête avec quelques confettis en mains commettent une infraction s'ils les lâchent en rue et risquent une amende administrative.



Ayant parcouru en long et en large le dossier, je n'ai trouvé aucune trace d'une évaluation de la politique de sanctions administratives déjà menée par la Ville de Tournai depuis plusieurs années Aujourd'hui, vous nous proposez d'étendre le nombre d'infractions à sanctionner et d'augmenter le montant des amendes. Celles-ci sont-elles efficaces ? Evitent-elles la récidive ? Ont-elles un réel effet dissuasif ? Comment pouvez-vous défendre l'extension d'une politique sans en évaluer l'impact ?



Sur les amendes administratives maintenant applicables à des infractions mixtes, liées à la petite criminalité locale (vols simples, coups injures..), ECOLO a déjà marqué son désaccord, insistant sur le caractère discriminatoire de cette loi. La Commune devient un acteur de la politique répressive et sécuritaire de premier plan.
Attribuer des compétences judiciaires à un organe exécutif met à mal l’égalité entre les citoyens, car les SAC ne seront pas appliquées de la même manière dans les différentes communes belges, et notamment les communes d'une même zone de police. Aucune information, aucun débat n'a été organisé à ce sujet au conseil de police de la zone du Tournaisis.
Le conseil d'arrondissement de l'aide à la jeunesse (ou d’autres organes consultatifs compétents en matière de jeunesse), n'ont pas été consultés comme le suggérait la Ministre de l'Intérieur Le CCAJ met en garde les communes de notre arrondissement judiciaire qui s'apprêtent à mettre en application cette loi :

« (...) il nous semble important que de telles mesures soient prises par l'appareil judiciaire qui garantit leur pertinence, tant pour les auteurs que pour les victimes et la société de manière générale. Cette société a tout intérêt à ce qu'un travail éducatif soit développé avec les jeunes contrevenants et leurs familles; c'est ce travail qui est actuellement effectué par les services de l'Aide à la Jeunesse et qui a été mis en exergue à différentes reprises dans les médias européens. Nous déplorons que les sanctions administratives communales n'aillent pas dans le sens de l'éducation et de la prévention ».


Des moyens budgétaires devront être prévus afin de créer ces postes de fonctionnaires sanctionnateur, constatateur, médiateur. Pourquoi ces moyens budgétaires, ne sont-ils pas attribués à la justice et, en particulier, à l'encadrement judiciaire des mineurs ? Cette question reste fondamentale aux yeux d'ECOLO.


Nous sommes réellement préoccupés par la sécurité et par le bien-vivre à Tournai. Nous ne voulons pas traiter ce sujet à la légère ni stigmatiser certaines parties de la population qui contrarieraient plus que d'autres la tranquillité publique à Tournai. C'est pourquoi face à ces nombreuses interrogations et aux dérives possibles, nous vous demandons de ne pas mettre au vote ce programme de sanctions administratives ce soir avant une réelle évaluation sur le terrain tournaisien et une consultation d'acteurs de terrain de la prévention, de l'éducation. ECOLO ne peut pas voter ce point aujourd'hui."


Voilà un mois que ce nouveau règlement communal a été voté en conseil communal. Il  est entré en vigueur à Tournai depuis le 1er janvier 2014 comme dans d'autres communes belges qui ont choisi d'appliquer cette loi.  ECOLO suivra sa mise en application et sera vigilant sur les dérives possibles.  Mais cela reste un mauvais choix politique : la justice, le troisième pouvoir dans une démocratie, manque de moyens pour être réellement efficace et accessible à tous. C'est ce pilier de notre démocratie qu'il fallait renforcer.  



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