Motion contre la privatisation de Belfius au conseil communal de ce 26 février 2018
Un peu d'histoire
D'où vient BELFIUS ?
Et pour les
Tournaisien(ne)s, quelles ont été les conséquences des errements des
grands stratèges financiers ?
Créée en 1860, la banque des
communes, Crédit communal de Belgique, était une banque au service
des collectivités locales et offrait les services bancaires de base
aux citoyens.
C'est dans les années 1990 que tout
bascule dans le monde de la finance et du crédit en Belgique.
Ce mouvement s'inscrit dans un double
contexte: la réorganisation du secteur public du crédit en Belgique
d'une part, et le mouvement de rapprochement, de fusion et de rachat
dans le secteur financier d'autre part. D'autres banques publiques se
privatisent à l'époque : la SNCI, la CGER (qui rejoint le
groupe FORTIS)
La cession du Crédit communal au privé
s'est opérée au niveau d'un holding de contrôle créé pour la
circonstance, le CCB Holding, et au travers d'une introduction en
bourse. Il s'est agi, avec un montant proche de 34 milliards de
francs, de la plus importante opération boursière réalisée dans
notre pays.
En 1996, naît la banque DEXIA, de la
fusion entre le Crédit communal belge (qui avait déjà pris pied au
Luxembourg dans la BIL) et le Crédit local de France. Elle est cotée
à EURONEXT, Bruxelles.
La banque DEXIA est vouée, selon son
management, à devenir une grande banque européenne voire mondiale
dans le domaine du financement des collectivités locales avec
l'acquisition de la FSA américaine en 2000, mais la stratégie
devient de plus en plus floue : une stratégie MONOPOLY (achat
de la banque hollandaise Labouchère, la banque turque Deniesbank.,
gestion de patrimoine au Luxembourg....) et une accumulation
d'erreurs de gestion s'ensuit.
Elle ne supportera pas les 2 crises
importantes du monde bancaire en 2008 et 2011. En 2008, la
Belgique injecte 3 milliards d'euros dans le capital de DEXIA,
notamment par l'emprunt contracté par les communes auprès de DEXIA
pour réaliser une augmentation de capital du holding communal (=
holding détenu à 100% par des participations communales et
représentant 17% du capital de DEXIA)..Le holding communal investit
l'argent communal UNIQUEMENT en prenant des participations dans
DEXIA.
On est donc dans cette situation
ubuesque, dénoncée d'ailleurs dans le milieu économique et
financier : les communes ont emprunté à DEXIA banque pour
pouvoir ensuite injecter de l'argent par le biais du holding communal
dans le capital de DEXIA holding qui détient DEXIA banque !!!!!
Pour Tournai, voici le résultat
financier désastreux de cette opération : La ville a emprunté
un montant de 2 900 000 euros en 2009 et a une charge d'emprunt à
rembourser de 350 000 euros par an jusqu'en 2019 DONT elle ne
récupèrera jamais rien puisque le holding communal a été dissous
entretemps.
A l'époque, en tant que représentante
du groupe ECOLO au conseil communal, j'avais émis plus que des
réserves sur cette opération obligeant les communes à débourser
ces sommes considérables dans un contexte plus que délicat de la
finance belge et mondiale. On m'avait répondu que le risque était
limité et que cette augmentation de capital permettrait d'engranger
des dividendes plus importants à l'avenir pour Tournai.
Quelle sont les suites de scénario ?
En fin 2011, suite à la crise des
dettes souveraines (Grèce notamment) la situation du groupe DEXIA
s'aggrave et sa dissolution devient inévitable pour se dégager des
« actifs toxiques » : la banque belge est à vendre
et c'est l'état belge qui rachètera l'ancien fleuron bancaire de
crédit public (Crédit Communal Belge) qui devient BELFIUS banque en
mars 2012 !
N'oublions pas que dans ce grand jeu de
MONOPOLY, les communes ont été les grandes perdantes. Elles ont ,en
fait, perdu deux fois : le coût de l'emprunt réalisé en 2009
reste à leur charge pour 10 ans MAIS le dividende important promis
par ces grands stratèges financiers, que devait dégager le holding
communal, s'évapore dès la fin 2011 avec la disparition du holding
communal.
Pour Tournai, cela représentait une
recette annuelle de +- 400 000 euros par an !!!
Si les Etats belges, surtout, mais
aussi français et luxembourgeois n'avaient pas apporté de l'argent
à ces banques qui jouent avec nos sous , DEXIA et d'autres groupes
financiers, couraient directement vers la faillite.
La main invisible du marché, grande
régulatrice des opérations économiques, auraitt purement et
simplement fait disparaître ces « grands » acteurs
financiers menés par de « grands » stratèges de
l'économie libérale !
Merci le monde de la finance et les
partisans du grand libéralisme économique et financier !
Alors, aujourd'hui, « on
r'comminche les amis ???? » Les p'tits belges vont de
nouveau payer pour les banquiers ?????
C'est pourquoi, Au nom du groupe ECOLO, je déposerai la motion suivante au conseil communal ce 26 février pour éviter que BELFIUS soit privatisé mais reste public et puisse à nouveau déployer ses services aux communes tout en ramenant des rentrées financières à l'Etat belge:
Considérant
que:
- Belfius, ex-Dexia Banque Belgique, a été rachetée par l’État belge pour 4 milliards d’euros, que la banque de défaisance Dexia sa a fait l'objet de deux recapitalisations successives par l’État belge, survenues en 2008 (2 milliards d’euros) et en 2012 (2,9 milliards d'euros), et qu’elle bénéficie de 35 milliards d'euros de garanties accordées par l’État belge ;
- Belfius a rapporté 215 millions d’euros de dividendes à l’État belge en 2016, et que le gouvernement prévoyait une recette de 309 millions de dividendes pour 2017 ; que cette situation bénéficiaire n'a pas empêché la suppression, de 2012 à 2016, de 670 emplois et une baisse salariale de 5%;
- le secteur bancaire belge est dominé par des banques étrangères qui déplacent les dividendes générés par les activités belges vers les maisons mères et des actionnaires étrangers, au lieu de les réinvestir dans l’économie locale et d’œuvrer à la préservation de l’emploi (voir BNP Paribas et ING, notamment) ;
- Belfius est une des quatre banques les plus importantes en Belgique, et actuellement la seule banque totalement publique ;
- beaucoup de pays voisins ont un secteur bancaire public fort sans que cela ne pose question (notamment : l’Allemagne, le Luxembourg et la Suisse) ; qui joue, au contraire, un rôle économique majeur, notamment par rapport aux défis énergétiques futurs et au financement de l'économie locale ;
- une banque publique a un effet stabilisateur en période de crise, comme cela a été mis en évidence en Allemagne après 2008 ;
- un actionnaire public pourrait garantir un service de base, accessible à tous les usagers ;
- au contraire, une ouverture du capital et une entrée en bourse pourraient :
- conduire Belfius à être gérée de manière à satisfaire les intérêts des actionnaires privés (les banques internationales chargées de la mise en bourse de Belfius cherchant à attirer préférentiellement un actionnariat international à la recherche d’un placement rentable), plutôt que les intérêts publics ;
- conduire Belfius à être guidée par des objectifs de bénéfices de court terme, au détriment de sa stabilité à long terme et du financement des collectivités locales, du secteur associatif et de l'économie locale, tombant par là dans les mêmes travers que ceux qui ont conduit Dexia à la faillite
- remettre en question l'attractivité, notamment en termes de taux et de durée, des crédits accordés par Belfius aux pouvoirs locaux et au secteur non marchand, si bien que certains projets d'investissement locaux ne pourraient plus être financés ;
- il y a un intérêt stratégique à garder Belfius aux mains des pouvoirs publics, tels que d'autres pays, comme l'Allemagne, l'ont fait avec des structures bancaires comparables, les transformant de véritables banques de développement, dont la prestation garantie de services stratégiques à l'économie interne, tel que l'octroi de crédits aux pouvoirs publics, au secteur associatif et aux PME, joue un rôle essentiel pour préparer le futur ;
- en cas de privatisation, les autorités perdraient le contrôle d’un partenaire financier unique dans son rôle de financement des investissements publics ;
- Belfius est la plus importante pourvoyeuse de crédit au secteur public en Belgique, et se décrit elle-même comme le bancassureur disposant du meilleur ancrage local ;
- la décision du gouvernement de procéder à une privatisation partielle de Belfius a été prise sans débat public sur le rôle et le futur de la banque ;
- avec un portefeuille de crédits de plus de 90 milliards, Belfius a le potentiel pour être un acteur de premier plan dans le financement de projets utiles à la population : énergies renouvelables, écoles, hôpitaux, soutien à l’économie locale, etc. ;
- une privatisation mettrait en péril ce potentiel ;
Le
Conseil Communal de …Tournai réuni le 26 février 2018…...
demande au gouvernement fédéral de :
- revenir sur sa décision de privatisation partielle de Belfius et de maintenir Belfius complètement dans le domaine public.
- organiser un débat public sur l'avenir de Belfius en tant que banque publique, et sur la gestion de celle-ci.
- doter Belfius d'objectifs d'avenir ambitieux favorisant l'accessibilité de tou.te.s les citoyen.ne.s et de toutes les entreprises, petites et grandes, à un service bancaire universel
- assurer, via Belfius, le service financier et le financement des collectivités locales, du secteur associatif, des acteurs de l'économie réelle et des objectifs en matière climatique et énergétique de la Belgique.
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